Tourisme : les quatre leçons de l’été
Pour le secteur touristique en France, le bilan de la saison estivale est globalement positif, en particulier grâce au grand retour de la clientèle étrangère. L’inflation continue en revanche de peser sur les comportements.
Malgré une météo capricieuse et un mois de juillet mitigé, la France a finalement vécu une saison estivale jugée « excellente » par les pouvoirs publics. Mais derrière ce diagnostic se cachent quelques disparités susceptibles d’inquiéter les acteurs de la filière. Alors que la rentrée approche à grands pas, voici quelques enseignements à retenir de l’été.
1. La clientèle internationale confirme son retour en force
C’est la bonne surprise de l’été : la destination France semble avoir conservé son attractivité auprès de la clientèle étrangère. C’est notamment le cas pour le moyen et le long-courrier : + 22 % pour les touristes américains, +140 % pour les Japonais, même si ces derniers sont encore moins présents qu’avant la crise (-45 %).
Les Européens, eux, semblent avoir retrouvé leurs habitudes d’avant-crise. De quoi offrir de belles perspectives économiques, puisqu’Atout France prévoit désormais des recettes annuelles issues du tourisme international de 64 à 67 milliards d’euros, contre 58 milliards l’an dernier.
En parallèle, les Français « ont sacralisé leurs vacances », fait-on valoir du côté du ministère chargé du secteur. Selon Atout France, 67 % d’entre eux seraient partis « en vacances ou en week-end » en juillet ou en août, dont 88 % en France.
Mais globalement, « ce qui remonte, c’est une légère baisse des volumes, qui restent toujours inférieurs à 2019 », précise Dominique Marcel, président de l’Alliance France Tourisme. « L’été a effectivement été très bon, mais il faut se rappeler que le chiffre d’affaires est tiré par les hausses de prix. Et que si les prix augmentent, c’est parce que les coûts augmentent. »
2. L’inflation pèse sur les comportements
D’un point de vue géographique, les cartes ont (un peu) été rebattues : même si la Provence-Alpes-Côte d’Azur et l’Aquitaine restent les régions les plus fréquentées, la moitié Nord progresse toujours. Le littoral semble, quant à lui, céder un peu de terrain à la montagne et à la campagne. Quant à la Corse, elle réalise une mauvaise saison, avec 4,5 % de touristes en moins. Les usages ont aussi évolué en faveur de comportements plus court-termistes et corrélés à la météo, avec une part plus importante des réservations de dernière minute.
Si le lien n’est pas clairement établi, ces changements pourraient bien résulter du contexte inflationniste, qui a une nouvelle fois produit des effets tangibles.
« Sur cette saison, nous voyons clairement l’impact du pouvoir d’achat sur les destinations choisies, les durées de séjour ainsi que le souhait de découvrir de nouvelles destinations. Mais cela ne concerne pas uniquement l’hébergement, la notion de « touristes fantômes » a été utilisée à de nombreuses reprises par les professionnels de la restauration, des activités culturelles, des offices de tourisme pour montrer qu’une fois sur place, le niveau de consommation a baissé », résume Laurent Dusollier, directeur général du groupe Odalys. Selon une enquête d’Atout France, 27 % des vacanciers déclarent ainsi avoir « moins consommé » dans les restaurants cet été.
3. Les locations et les campings font le plein
Ces choix économiques peuvent également se traduire dans la sélection de l’hébergement. Certes, les villages et résidences de vacances restent en bonne forme : avec un taux de remplissage (+7 %) et un chiffre d’affaires (+6 %) en hausse, Belambra fait état d’un « bilan positif ». Idem pour Pierre & Vacances Center Parcs, dont la saison a été « meilleure que 2022 pour l’ensemble des marques ». L’hôtellerie, dont les prix ont fortement augmenté depuis 2019, voit en revanche son taux d’occupation baisser. Tout le contraire de l’hébergement locatif – permettant notamment de cuisiner à domicile – qui grimpe de près de 12 % en un an.
Quant au camping, traditionnel refuge contre l’inflation, la saison a été bonne dans l’ensemble. La fréquentation globale devrait même être supérieure à l’an dernier, selon la Fédération nationale de l’hôtellerie de plein air (FNHPA). Et la météo, auquel le secteur est particulièrement sensible, n’a pas vraiment eu d’effets délétères, malgré quelques « transferts » du Nord au Sud. Les régions qui progressent le plus restent les Pays de la Loire (la Vendée étant le département le plus prisé), la Bretagne et les Hauts-de-France.
Malgré tout, quelques ombres au tableau subsistent. Comme sur l’ensemble du territoire, la forte présence de la clientèle étrangère est pour beaucoup dans cette saison réussie. La fréquentation des Français, elle, est en recul, « sans doute à cause d’une dégradation du taux de départ en vacances des familles modestes et des classes moyennes », avance un bon connaisseur du secteur. Le tout malgré une semaine supplémentaire de haute saison – celle débutant le 28 août – puisque la rentrée scolaire interviendra plus tard cette année. Enfin, des arbitrages sur les activités autres que l’hébergement (bars, restaurants, spa, etc.) pourraient avoir un effet négatif sur le chiffre d’affaires des professionnels.
4. Le tourisme français se prépare à un été indien
En dépit de ces quelques bémols, les professionnels tricolores peuvent se satisfaire de cette saison estivale… d’autant que les prochaines semaines s’annoncent radieuses. Pour le mois de septembre, les réservations sont en effet en hausse, de 4 % dans l’hôtellerie ou de 20 % sur les plateformes locatives, selon Atout France.
Combinées au retour des touristes dans les grandes villes – Paris s’attend, par exemple, à une fréquentation en hausse de 24 % -, et du tourisme d’affaires, ces perspectives s’annoncent donc réjouissantes. Avec, cerise sur le gâteau, l’organisation de la Coupe du monde de rugby dans plusieurs villes de France à partir du 8 septembre.
Par Yann Duvert – A retrouver en cliquant sur Source