Restaurants : le casse-tête de la réouverture en quatre questions
Le secteur s’active pour accueillir à nouveau des clients après sept mois de fermeture. Il doit remobiliser ses salariés et gérer au mieux ses approvisionnements, selon une montée en charge progressive. Tour d’horizon en quatre questions.
Pour Le Général Beuret, café-restaurant du 15e arrondissement parisien, le branle-bas de combat a commencé dès le mercredi 28 avril, avant les annonces du président de la République. Une nécessité après six mois de fermeture sans pratiquer la vente à emporter.
Parmi ses priorités : nettoyer et déloger les pigeons qui avaient profité du long arrêt pour se nicher sous l’auvent. Mais l’établissement a un atout clé, été comme hiver : une rangée de tables très demandées, à l’angle de deux rues. Comme bon nombre de confrères partout en France, il est sur les starting-blocks pour la réouverture des terrasses le 19 mai.
Hormis les restaurants des hôtels qui pourront à la même date servir à l’intérieur les clients de leurs chambres, les professionnels devront cependant attendre le 9 juin pour pouvoir à nouveau ouvrir leurs salles, en respectant une jauge de 50 %. Avec, pour chacun, une équation particulière à résoudre.
1. Est ce rentable de rouvrir dès le début ?
La question de la réouverture le 19 mai ne se pose qu’aux 25 à 30 % d’établissements pouvant recevoir leurs clients dehors. Mais pour certains d’entre eux, l’activité sur les seules terrasses n’est pas rentable. Pour des professionnels attendant de longue date de pouvoir servir à nouveau leurs clients à table, ce premier pas représente cependant une bonne remise en route.
« L’heure du réveil a sonné et avec un calendrier défini, toute la profession peut se projeter et se remobiliser », estime François Blouin, le président fondateur de Food Service Vision. Le couvre-feu repoussé le 19 mai à 21 heures permettra, en outre, d’assurer une partie du service du soir. Le spécialiste des burgers à la française Big Fernand compte d’ailleurs lancer à cette occasion une offre dédiée à l’apéritif.
Chez Buffalo Grill et Courtepaille , la quasi-totalité des établissements dispose d’une terrasse. « Nous allons pouvoir mettre pleinement en oeuvre un parcours client digitalisé et faire vivre ensemble pour la première fois à ce niveau le service à table, le ‘click and collect’ et la livraison », souligne Jocelyn Olive, le dirigeant des deux réseaux.
Le 9 juin, avec un couvre-feu à 23 heures et donc un dîner normal, la majeure partie du secteur devrait accueillir en salle ses clients malgré la jauge de 50 %. Mais tout est une question de positionnement et d’emplacement. A Paris, que les habitants risquent de déserter comme l’an dernier cet été quand toutes les tables pourront à nouveau être occupées et qui ne seront pas remplacés par le flot habituel de touristes, certains établissements, en particulier gastronomiques, prévoient d’attendre septembre.
2. Comment retrouver ses salariés ?
L’une des grandes craintes du secteur, c’est de manquer de personnel après un si long temps de chômage partiel. Avec à la clé des reconversions liées à l’inactivité forcée et la découverte d’horaires plus compatibles avec la vie de famille.
« L’inquiétude de la forme physique et psychologique des salariés est réelle. Mais maintenant que le signal est donné, on va retrouver des vocations pour des métiers d’échanges. Il y aura sûrement des tensions durant les deux à trois premiers mois mais ces professions sont suffisamment souples pour faire entrer de nouvelles personnes », prédit François Blouin.
Le contact conservé au fil des mois est vital. Chez Buffalo Grill et Courtepaille, environ 30 % du personnel ont travaillé depuis novembre pour la vente à emporter et la livraison. « Cela fait en outre six mois que nous investissons largement dans la formation de tous les collaborateurs. La différence maintenant est, après l’entraînement, d’entrer dans le match », remarque Jocelyn Olive.
3. Que se passe-t-il côté approvisionnement ?
Les professionnels de la restauration ont été entendus sur la nécessité d’avoir un calendrier suffisamment en amont pour pouvoir se préparer.
Les fournisseurs, lourdement pénalisés eux aussi par les fermetures, ont maintenu le lien, à l’instar du poids lourd Metro dont l’opération « Place aux Restos » a permis à 700 restaurateurs de vendre leurs plats sur les marchés. Tandis que les chefs ont tout fait pour soutenir les producteurs au travers de la vente à emporter.
Le monde de la bière , pour lequel le circuit hors domicile est crucial, regagne de la visibilité. « Il faut au moins trois semaines pour produire des fûts, auxquelles s’ajoute la logistique pour les faire parvenir dans les établissements. Il est indispensable d’éviter tout risque de ‘stop and go’ », avertit Maxime Costilhes, délégué général de Brasseurs de France.
4. Les clients seront-ils au rendez-vous ?
Nul doute, les Français n’ont jamais autant parlé de restaurants que depuis qu’ils ne peuvent plus y aller. Leur réouverture est devenue un symbole d’une liberté en partie retrouvée.
Selon une étude de TheFork (anciennement La Fourchette), spécialiste de la réservation en ligne, la fréquentation des restaurants arrive en tête des activités manquant le plus durant la pandémie. C’est le cas de 86 % de Français, contre 75 % rêvant de voir famille et amis.
Une personne sur deux projette même de retourner au restaurant dans les quinze jours après la réouverture selon Food Service Vision. De quoi rassurer les propriétaires d’établissements. A eux de mettre en oeuvre de nouvelles façons de gérer les flux – et aux clients désireux de retrouver les terrasses d’apprendre à les réserver tôt.
Article de Clotilde Briard – A retrouver en cliquant sur Source
Source : Restaurants : le casse-tête de la réouverture en quatre questions | Les Echos