Dry January : l’essor phénoménal des boissons sans alcool
Le sans alcool est en plein expansion dans le monde. En France, il rencontre un nouveau succès qui pousse les leaders du secteur à investir. Décryptage en chiffres.
Manger de la viande sans viande, boire de l’alcool sans alcool… Depuis quelques années, les boissons sans alcool ont envahi les rayons des supermarchés et les frigos des bars. Pour ceux qui souhaitent renoncer à l’alcool – ou modérer leur consommation – sans pour autant se retrouver avec un verre d’eau plate à la main, il existe ainsi une gamme très diverse de bières, cidres, vins et spiritueux avec de très faibles teneurs en alcool, voire 0% d’alcool. Et en ce «Dry january» comme on dit (ou «Janvier sobre»), ces alternatives à l’éthanol pourraient en intéresser certains.
Du 1er au 31 janvier, de plus en plus de Français relèvent le défi et décident de faire une pause dans leur consommation de boissons alcoolisées. Un sondage Ifop de décembre 2023 révélait qu’un tiers des Français envisageait de participer au défi, soit 17 millions de personnes. De manière générale, la moitié des Français (52%) prévoit de boire moins d’alcool, d’après une enquête menée par CGA, et 16% ont déjà commencé à la limiter. Lorsqu’ils sortent, 41% boivent des «mocktails» (cocktails sans alcool) et 34% optent pour une bière sans alcool ou à faible teneur en alcool.
La France, championne des nouvelles recrues
Les chiffres du marché soulignent cette nouvelle tendance, en France comme à l’international. Le marché mondial des boissons sans alcool et à faible teneur en alcool a augmenté de 7% en volume en 2022 vs 2021 (+9% pour le «zéro alcool»), selon une étude menée par l’institut britannique IWSR, pour peser 11 milliards de dollars en 2022, contre 8 milliards en 2018. Le rythme de croissance devrait se poursuivre et dépasser celui des quatre dernières années, avec un taux de croissance annuel composé (TCAC) en volume prévu de +7% de 2022 à 2026, contre +5% de 2018 à 2022, selon la même étude.
Cette croissance tient autant du recrutement de nouveaux consommateurs du sans alcool que de la diversification de l’offre, avec une amélioration du goût des produits et un perfectionnement des techniques de production. En France, les ventes de boissons sans alcool ont augmenté de 5,5% en volume entre avril 2022 et avril 2023, alors que celles de boissons alcoolisées (hors vin) ont baissé de 2,5% sur la même période.
À LIRE AUSSIDry January : «La sobriété a été une victoire triomphante pour moi»La France est le pays qui compte le plus grand nombre de nouveaux consommateurs, avec une hausse de 25% de «buveurs modérés» en 2022, selon l’étude d’IWSR. D’après B&S Tech, qui accompagne les marques dans le lancement de produits sans alcool, ces nouveaux «flexibuveurs» sont principalement des femmes de 25 à 39 ans, des jeunes de 18 à 24 ans, et des seniors (+65 ans), qui s’orientent vers le «no alcool» ou «low alcool» pour des raisons de santé, de goût ou de poids.
Une croissance boostée par la bière sans alcool
Les marques se sont adaptées pour répondre à cette nouvelle demande du consommateur. Et c’est la bière, première boisson alcoolisée à proposer des équivalents sans alcool, qui domine le marché. Dans un contexte où la consommation globale de bière a baissé de 4,7 % sur les huit premiers mois de l’année 2023 en raison de l’inflation et de la hausse du coût du verre, le segment de la bière sans alcool est le seul en croissance dans sa catégorie (+15,3%).
La bière sans alcool se divise en plusieurs segments : celui du très faible taux d’alcool, inférieur ou égal à 1,2 degré, celui du 0,0% obtenu par évaporation sous vide de l’alcool, ainsi que le segment des aromatisés à base de jus de fruits, destiné à séduire les consommateurs de soda. La France autorise la dénomination «bière sans alcool» à la condition que celle-ci affiche un taux d’alcool inférieur ou égal à 1,2% par volume, selon la réglementation en vigueur. Il existe aussi des bières certifiées «halal», avec 0,0% d’alcool.
La bière sans alcool ou à faible teneur d’alcool ne date pas d’hier, mais l’accélération du marché s’est opérée avec le lancement de la Tourtel Twist par Kronenbourg en 2015, qui domine aujourd’hui le secteur : 43% du marché de la bière sans alcool est détenu par Kronenbourg grâce à sa gamme de Tourtel Twist. La marque a d’ailleurs remporté un contrat pour devenir l’un des sponsors officiels des Jeux olympiques et paralympiques de 2024. Depuis le lancement de Tourtel, Kronenbourg a lancé «trois ou quatre bières 0% chaque année, pour un portefeuille de bières sans alcool de la brasserie qui atteint désormais 12% du total», indique Philippe Collinet, directeur de la communication de Kronenbourg. Le marché de la bière sans alcool croît «de 5 à 7 fois plus vite que le marché de la bière classique» depuis le milieu des années 2010, au point de représenter aujourd’hui «de 5 à 6% du marché global de la bière en France», selon lui.
À LIRE AUSSILes (nouvelles) recettes des spiritueux sans alcool pour séduire les FrançaisHeineken suit Kronenbourg de près avec sa bière 0,0% lancée en 2017, qui a progressé de 103% en deux ans. La marque néerlandaise compte décliner l’ensemble de ses marques (Desperados, Grimbergen, Affligem…) en sans alcool, grâce à un investissement de 6 millions d’euros pour développer la technologie nécessaire à la production de ce type de boisson. Le leader mondial, AB InBev (Budweiser, Corona, Stella Artois, Leffe…) estime que les bières sans alcool représenteront au moins 20% de sa production totale d’ici à 2025. Les brasseries artisanales se mettent à leur tour à produire leurs propres bières sans alcool.
Par Héloïse Uberti – A partager en cliquant sur Source
Source : Dry January : l’essor phénoménal des boissons sans alcool