Perte de confiance des consommateurs dans leur alimentation : menace ou opportunité pour les industriels ?
En 2018, la qualité des produits alimentaires en France n’a jamais été aussi bonne et les contrôles sanitaires jamais aussi nombreux. Et pourtant, chaque année, le même refrain se répète… Les scandales alimentaires animent les chroniques, déchaînent les foules et sont au cœur de nombreux débats publics : lasagnes à la viande de cheval, poulet à la dioxine, lait infantile contaminé à la salmonelle, œufs contaminés au fipronil… Des dossiers chocs qui déstabilisent les industriels, ce n’est pas ce qui manque ! Responsabilités questionnées, transparence mise en doute, comment le secteur agroalimentaire peut regagner la confiance du consommateur ?
Un climat de défiance industrielle constante
Etudes, reportages, manifestations, débats, séminaires, émissions télévisées, articles dans la presse, chaque jour les dérives des industriels, les couacs dans les processus de production alimentaire ou encore la banalisation de la « malbouffe » au détriment de la santé publique fait couler de l’encre. Diffamation ou réalité ? Paranoïa ou dénonciations fondées ? Une chose est sûre : le secteur fait face à une grave crise de confiance des consommateurs avec une interrogation redondante trop souvent laissée sans réponse : « que mettez-vous réellement dans nos assiettes ? ».
D’après une récente étude de Keedn Food, 28% des Français déclarent ne plus croire aux promesses des industriels. En première ligne de cette course à la défiance : les 25-34 ans. Neuf consommateurs sur dix appartenant à cette tranche d’âge estiment ne pas avoir confiance dans leur alimentation quotidienne. Pour la grande majorité d’entre eux, au-delà d’être informés sur l’aspect nutritionnel d’un produit, avoir une visibilité sur sa provenance, sa conception et ses conditions de production est de rigueur. Pas de transparence, pas de confiance. Face au doute, le changement est de mise ! Les marques le savent, et les consommateurs le leur font savoir !
Des consommateurs connectés de plus en plus exigeants
Réseaux sociaux, blogs, médias interactifs, chaînes d’information continue… tout savoir sur tout, tout le temps et en temps réel est un phénomène qui s’amplifie d’année en année grâce à l’essor du digital ainsi qu’à l’évolution du comportement de tous quant au traitement et à la création de l’information. Les acteurs d’aujourd’hui sont les spectateurs d’hier. Sur internet, tout se commente, se partage, se sait, s’amplifie, se multiplie, se note, s’anonymise, se pseudonymise, se généralise et se partage à nouveau. De boucle en boucle, de répétition en répétition, la reproduction est la norme et dans cette spirale sans fin, la subjectivité est reine. Dans ce contexte, le mot d’ordre est clair : plus de transparence sur la qualité, la contenance, la provenance et la traçabilité des produits commercialisés.
« L’élément clé qui manque souvent dans les stratégies des entreprises n’est pas réellement le savoir-faire mais plutôt le faire-savoir. »
Au-delà de cette transparence et du progrès de communication qui doit être réalisé pour rassurer les consommateurs, saisir leurs attentes réelles est de mise. Quelles informations souhaitent-ils recevoir – et ne plus recevoir – de la part des producteurs, commerçants et industriels ? Quels types de produits plébiscitent-ils ? A quel prix ? A quelle fréquence ? Via quel canal de distribution ? Ne l’oublions jamais : c’est le consommateur qui achète un produit. C’est lui qui accepte (ou pas) de suivre une tendance. C’est lui qui construit la réputation et la notoriété d’une marque. Être conscient de ce rapport de force pousse à créer une expérience client unique, cohérente et adaptée à la demande.
« Le consommateur ne doit rien déduire, il doit tout comprendre. »
Les industriels se doivent de retranscrire leurs engagements avec clarté et transparence sans tenter de mener en bateau les consommateurs. Si les consommateurs ont l’impression – ou pire, la certitude – d’être trompés, tisser une relation de confiance avec eux devient très compliqué.
Mais attention, la transparence est une condition nécessaire mais non suffisante ! Il faut que le produit réponde à l’ensemble des attentes des consommateurs.
Tout l’enjeu pour les marques est de « se projeter » : mettre en place dès maintenant des initiatives permettant de répondre aux attentes de demain, proposer une approche nouvelle de la consommation alimentaire qui provoquera des émotions, des envies d’en savoir plus sur les produits et la marque et de l’interaction directe entre la marque et ses clients. Cultiver sa différence, c’est bien cela qui place une entreprise ordinaire au rang de visionnaire.
Concrètement, ces initiatives doivent être développées autour de 5 axes incontournables :
· Qualité : qualité sanitaire évidemment, renseigner les consommateurs sur les recettes ainsi que sur les méthodes de production. La transparence est la base d’une relation de confiance.
· Proximité : géographique mais pas que ! Il est important d’instaurer une proximité dans la chaîne de valeur en limitant les intermédiaires pour rapprocher consommation et production.
· Traçabilité : avec différents niveaux d’utilisation : une traçabilité réglementaire pour être capable de réagir en cas de problème, une traçabilité qui vient justifier les promesses des industriels aux consommateurs, et une traçabilité en tant que valeur par elle-même, notamment pour faciliter le lien avec la production.
· Adaptation : suivre les évolutions des modes de consommation est important. Prédire celles à venir l’est encore plus. Dans ce sens, concentrer ses efforts de production sur des produits qui représentent un fort potentiel commercial – et qui sont en phase avec les valeurs et les capacités de production d’une marque – doit être une priorité.
· Communication : soigner son image de marque est crucial. Et la communication ne peut pas être qu’une succession de mots vides de sens. Ce qu’on dit, on le fait. Ce qu’on dit représenter, on le représente. Être et ne pas paraître est essentiel pour que les consommateurs sachent exactement vers qui ils se tournent à l’heure de réaliser un achat.
La transformation est la clé de la réussite. La perte de confiance peut être une opportunité pour les industriels à condition qu’ils se servent des erreurs commises par le passé pour mieux appréhender le futur. Dans un monde en perpétuelle évolution, suivre le rythme imposé par les consommateurs n’est pas une option mais bel et bien une obligation pour tout industriel désireux de consolider sa position dans la course à la compétitivité. Maintenir le cap est une question de survie. Entre agir ou subir, le moment de prendre une décision a sonné !