Compagnie Coloniale, fière de son savoir-faire dans le thé
L’ex-filiale d’Unilever, qui se dit la plus ancienne marque de thé française, profite de la montée en gamme du marché.
Vincent Balaÿ dit du bien de ses concurrents, les Kusmi, Mariage Frères et Dammann… « Je les remercie tous les jours car ils ont rajeuni l’image du thé. » Compagnie Coloniale, qu’il relance depuis 2010, se flatte de sa longue antériorité dans le métier. « Fondée en 1848, c’est la plus ancienne des marques françaises. Une des dernières aussi à assembler elle-même ses thés, y compris pour d’autres », fait valoir cet ancien directeur export du secteur de la beauté, reconverti entrepreneur pour passer plus de temps avec sa famille.
Comme souvent, c’est le hasard qui le pousse à se porter candidat à la reprise du site de Dissay, près de Poitiers, l’ancienne usine Lipton Royco d’Unilever : « Ma belle-famille était du coin ». A la barre du tribunal, les voix des salariés ont fait pencher la balance en sa faveur face aux autres candidats, prêts à mettre plus cher mais qui voulaient délocaliser. Rachetée par Unilever avec les tisanes Eléphant dans les années 1980, Compagnie Coloniale, cantonnée au seul marché français, avait doucement périclité. Cédée ensuite à un petit concurrent sans moyens (Indar), la marque n’avait pas évité le dépôt de bilan avant la reprise par Vincent Balaÿ et sa femme Marie-Emmanuelle.
« Il se passe dans le thé le même phénomène que celui observé dans le vin et le whisky. »
Sept ans plus tard, Compagnie Coloniale profite, comme ses rivales, de la croissance à deux chiffres du marché du thé, accompagnée d’une montée en gamme. « Il se passe dans le thé le même phénomène que celui observé dans le vin et le whisky. » Rafraîchi, le packaging a conservé son ancre marine et ses rayures. A l’heure où le sujet de la colonisation reste polémique, l’appellation n’a jamais posé de problème. « Les gens comprennent que c’est une marque. En sept ans, j’ai reçu quatre courriers sur le sujet et nous répondons que l’année de création de la société est aussi celle de l’abolition de l’esclavage en France », explique Vincent Balaÿ. Vert ou noir, aromatisé (porte d’entrée du thé en France), Compagnie Coloniale aligne un catalogue de 160 mélanges et origines diverses, dont une cinquantaine assurent plus des deux tiers des ventes (2,5 millions d’euros en 2016).
Jouer avec le calendrier
Le best-seller incontesté reste l’assemblage le plus ancien, « Chine Extra » à base de quatre variétés : yunan, keemum, panyong et lapsang souchong. « C’est notre petite madeleine de Proust. » Autres valeurs sûres, les earl grey, le thé vert à la menthe et le rooibos, infusion d’Afrique du sud entrée dans le Top 10 et justifiant une version avec baies de goji pour la Saint-Valentin. D’une façon générale, la vente de thé est rythmée par le calendrier : thés de Noël (d’octobre à janvier), thé de printemps (first flush darjeeling), fêtes des mères, etc. L’occasion parfois de collaborations inattendues, comme celle avec La Bière Parisienne ou, plus classique, Le chocolat des Français.
Cibler certaines grandes surfacesServi dans le TGV et présent dans 450 points de ventes haut de gamme, épiceries fines, torréfacteurs et boulangeries pâtisseries, Compagnie Coloniale aimerait revenir chez Monoprix. La grande distribution lui fait les yeux doux et Vincent Balaÿ a ouvert des corners dans une petite dizaine de Leclerc. « Nos produits ont besoin d’être expliqués. »
Valoriser le made in FranceAprès une introduction en Bourse décevante il y a deux ans, la récente levée de fonds (1 million d’euros apporté par Meeschaert) permet à Compagnie Coloniale de repartir à l’export en s’appuyant sur l’image de qualité attachée à la gastronomie française. En Corée du sud, les réseaux sociaux ont beaucoup relayé l’opération de cobranding menée avec la marque A True Cosmetics, qui utilise de l’infusion de thé Compagnie Coloniale pour ses crèmes et a offert pour chaque lotion démaquillante achetée un sachet de thé de la marque. Plus classiquement, Vincent Balaÿ passe par des distributeurs en Allemagne, au Japon et bientôt en Italie.
Source : Compagnie Coloniale, fière de son savoir-faire dans le thé, Conso – Distribution